L’ÉCONOMIE DE LA RÉGULATION ENTRE INTÉRÊT PUBLIC ET INTÉRÊTS PRIVÉS : CAPTURE, CONFLITS D’INTÉRÊTS ET REVOLVING DOORS

L’économie de la régulation entre intérêt public et intérêts privés :

capture, conflits d’intérêts et revolving doors

salle des conférences du bâtiment Max Weber
18 septembre 2023

 

Le colloque s’inscrit dans la série de manifestations scientifiques annuelles initiées conjointement par plusieurs chercheurs et chercheuses d’EconomiX depuis 2021 dans le but d’étudier les relations et interactions de l’analyse économique et des autres sciences sociales sur des thématiques précises de sciences sociales. La troisième édition de cette série annuelle de manifestations scientifiques se tiendra le lundi 18 septembre 2023. Elle portera sur le thème « L’économie de la régulation entre intérêt public et intérêts privés : capture, conflits d’intérêts et revolving doors». A l’intersection de différents champs de l’analyse économique (économie politique, économie publique, économie de la réglementation) et renvoyant à de nombreuses dimensions d’économie appliquée (banque et finance, santé, environnement, entreprise…), cette thématique a été choisie pour sa capacité à susciter le dialogue pluridisciplinaire en sciences sociales. Les intervenant.e.s relèvent donc de disciplines de sciences sociales variées : sociologie, science politique, droit, économie. Le choix de la thématique s’explique aussi par la volonté d’intéresser à la manifestation non seulement des chercheurs et chercheurs rattachés à différents axes du laboratoire EconomiX, mais aussi des membres d’autres laboratoires et disciplines de l’Université Paris Nanterre (notamment, sociologues, juristes, politistes, historiens) et d’autres laboratoires et établissement franciliens et français. L’approche retenue pour le colloque est donc résolument pluridisciplinaire.

 

Le constat de l’influence des intérêts particuliers sur la production régulatoire n’est pas nouveau. Initialement émis par des politistes (e.g. Bernstein, 1955) et des historiens (e.g. Kolko, 1965), il a depuis les travaux de Stigler et Friedland (1966) et Stigler (1971) suscité une littérature économique particulièrement abondante, dans le sillage de l’école des choix publics (public choice) se développant à partir des années 1960 aux Etats-Unis. Dans les années récentes, les travaux empiriques se sont multipliés dans différents domaines de l’économie appliquée, soulignant la proximité des régulateurs et des agents réglementés et les dangers des revolving doors et de la porosité entre sphère privée et sphère publique pour le bien commun (voir, par exemple, Lucca, Saru et Trebbi (2014) ou Shive et Forster (2015) sur la capture de la régulation financière ; Tabakovic et Wollmann (2018) sur le droit de la propriété intellectuelle…). Depuis la crise de 2008, l’analyse économique développe également une réflexion innovante sur la nature même de la capture et, plus généralement, les canaux de l’influence des intérêts privés sur la régulation publique. Au-delà de la ‘simple’ capture régulatoire à la Stigler, elle distingue ainsi désormais différentes formes de capture (par exemple, capture collusive vs. capture non collusive ; formes de capture culturelle, cognitive, sociale, deep capture…), correspondant à des mécanismes différents qu’elle s’attache à expliciter. Empiriquement, la réflexion sur la diversité de ces formes de capture a donné lieu à des travaux récents, dans des domaines d’économie appliquée diversifiés (par exemple, sur la relation entre trajectoires professionnelles des gouverneurs des banques centrales et contenu de la régulation financière, voir Mishra et Reshef, 2019). En outre, si les premières analyses de la capture donnaient lieu à une interprétation et des recommandations très largement hostiles à l’intervention publique, les travaux plus récents s’interrogent davantage sur les moyens de limiter le risque de capture de la réglementation et du droit par les intérêts privés et de garantir une production juridique favorable au bien public.

 

L’abondante littérature économique fait écho à des travaux très riches menés sur des thématiques connexes par les autres sciences sociales. Cependant, la proximité entre les travaux des différentes disciplines est rarement signalée explicitement, reconnue, voire exploitée par les chercheur.se.s des différentes disciplines. Alors que la sociologie, le droit ou la science politique ont développé un appareil conceptuel sophistiqué pour appréhender la question de l’influence des intérêts privés sur les régulations publiques et multiplient dans le même temps les travaux empiriques à partir de terrains variés (voir par exemple, en sociologie, les travaux récents de Boullier (2019) et Boullier et Henry (2022) sur l’industrie chimique ou dans le domaine de la santé, Boullier et al. (2021) ; en droit, Kerléo (2021, 2022) sur la déontologie gouvernementale et la haute fonction publique, Moret-Bailly (2014) ; Moret-Bailly et Truchet (2022) ; en science politique, Antoine Vauchez (2017) sur la production juridique des autorités administratives indépendantes), la fertilisation croisée entre ces disciplines et les analyses économiques paraît encore limitée, essentiellement du fait d’un dialogue insuffisant.

 

Face à ce constat, l’objectif du colloque est d’ouvrir un espace de dialogue pluridisciplinaire afin i) de contribuer à faire mieux connaître et diffuser les travaux des différentes disciplines sur une thématique qui leur est commune dans un espace transdisciplinaire ii) de comparer et enrichir les approches méthodologiques et principaux résultats des différentes disciplines iii) à terme, de favoriser les projets de recherche pluridisciplinaires iv) de réfléchir conjointement à des propositions et dispositifs institutionnels opérants visant à réduire le coût social de régulations publiques perméables aux intérêts privés.

 

Le colloque est organisé sur invitation. Les intervenant.e.s seront des chercheurs et chercheuses seniors et juniors, économistes, juristes, politistes et sociologues, spécialistes de la question de la capture régulatoire, des revolving doors et des conflits d’intérêts. Les présentations des intervenant.e.s seront suivies d’une discussion (assurée par un.e chercheur.se d’une autre discipline et/ou un.e professionnel.le dans le domaine de la régulation sectorielle – les invitations des chercheur.se.s académiques sont d’ores et déjà confirmées ; pour les professionnel.le.s des autorités de régulation, les invitations sont en cours).

 

PROGRAMME

9h00-9h15 - Accueil des participant.e.s et café


9h15-9h30 - Propos introductif des organisateur.trice.s : Sophie Harnay, Benjamin Monnery, Laurence Scialom, Fabrice Tricou (Université Paris Nanterre & EconomiX)


9h30-11h30 – Les institutions publiques face au risque de capture (1)


Présidence de session : Fabien Bottini (Le Mans Université et Institut Universitaire de France)


 - Cyril Benoît (CNRS, Sciences Po & Centre d’études européennes et de politique comparée), « Attention publique, pressions du secteur privé et capture des agences de régulation indépendantes »
 - Sylvain Laurens (Directeur d'études à l'EHESS et chercheur au CMH), « Le rôle des bureaucraties dans la détermination des rationalités économiques : au-delà de "l'influence", les enjeux transversaux des rapports entre firmes et hauts fonctionnaires »
 - Benjamin Monnery (Université Paris Nanterre & EconomiX) et Florent Dubois (University of Reading), « Utiliser des ressources publiques à des fins privées ou électoralistes ? Une analyse économétrique des usages de la réserve parlementaire par les sénateurs français »


11h30 – PAUSE-CAFE


11h45-13h05 - Les institutions publiques face au risque de capture (2)


Présidence de session : Said Souam (Université Paris Nanterre & EconomiX)


 - Henri Boullier (CNRS, Université Dauphine PSL, IRISSO), « Détour par les travaux sur l’ignorance. Quand l’évaluation réglementaire des risques favorise l'emprise des industries »
 - Samira Guennif (Université Sorbonne Nord & IRIS), “Capture and passive predation in times of COVID‑19 pandemic”

 

13h05-14h30 – DEJEUNER

 

14h30-15h50 – Prévenir et gérer les conflits d’intérêt (1)


Présidence de session : Mathias Amilhat (Université Toulouse Capitole, Observatoire de l’Ethique Publique)


 - Jean-François Kerléo (Université Aix-Marseille & Institut Universitaire de France), « Un état des lieux des dispositifs de prévention des conflits d’intérêts et des résistances juridiques qui s’y opposent »
 - Jana Vargovcikova (INALCO) et Antoine Vauchez (CNRS, Université Paris 1 & CESSP), « Corps privés, intérêts publics. Politique de la transparence et ‘régulation déontologique’ à la HATVP »

 

15h50– PAUSE-CAFE

 

16h05-17h25 – Prévenir et gérer les conflits d’intérêt (2)


Présidence de session : Jean-François Kerléo (Université Aix-Marseille & Institut Universitaire de France)


 - Joël Moret-Bailly (Université de Lyon (Saint Etienne & Cercrid), « Déontologie et gestion des conflits d’intérêts : logiques et enjeux »
 - Laurence Scialom (Université Paris Nanterre & EconomiX), « Enseigner l'éthique autrement pour prévenir conflits d'intérêt et capture »


17h30 – Clôture

 

LOCALISATION

Salle des conférences, Rez-de-chaussée, bâtiment Max Weber, Université Paris Nanterre, 200 avenue de la République 92001 Nanterre.

 

RENSEIGNEMENTS PRATIQUES ET INSCRIPTIONS

La conférence se tient uniquement en format présentiel.
Inscription gratuite (dans la limite des places disponibles) et obligatoire en contactant :
sophie.harnay@parisnanterre.fr
RAF@observatoire-ethique-publique.com

 

ORGANISATION

S. Harnay, B. Monnery, L. Scialom, F. Tricou

 

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